La greffe de cornée, aussi appelée kératoplastie, est une intervention chirurgicale qui consiste à remplacer tout ou partie de la cornée malade ou endommagée par une cornée saine provenant d’un donneur. C’est l’une des greffes les plus pratiquées dans le monde, avec un taux de réussite élevé. Grâce à cette chirurgie, de nombreuses personnes atteintes de troubles visuels graves peuvent recouvrer une vision satisfaisante, voire normale.
Qu’est-ce que la cornée ?
La cornée est la membrane transparente située à l’avant de l’œil. Elle joue un rôle crucial dans la vision :
- Elle laisse passer la lumière vers la rétine.
- Elle contribue à la mise au point de l’image (environ 70 % du pouvoir de réfraction de l’œil).
Une cornée saine est claire, lisse et régulière. Lorsqu’elle est opacifiée, déformée ou lésée, la vision devient floue, voire impossible. La greffe est alors parfois le seul traitement envisageable.
Quand a-t-on besoin d’une greffe de cornée ?
La greffe est indiquée dans plusieurs situations, notamment :
1. Kératocône
Maladie évolutive dans laquelle la cornée s’amincit et se déforme en forme de cône, entraînant une baisse de la vision. Dans les stades avancés, la greffe est nécessaire.
2. Opacités cornéennes
Elles peuvent être dues à :
- Des infections (herpès, kératite)
- Des traumatismes (brûlure, corps étranger)
- Des cicatrices post-chirurgicales ou post-inflammatoires
3. Défaillance de l’endothélium
L’endothélium est la couche interne de la cornée, chargée d’en maintenir la transparence. En cas de dystrophie de Fuchs ou de décompensation post-opératoire (après chirurgie de la cataracte, par exemple), une greffe est indiquée.
4. Rejets de greffe précédente
Dans certains cas, une greffe peut échouer et nécessiter une reprise.
Types de greffes de cornée
Selon la localisation et l’étendue de la lésion, on distingue :
1. Kératoplastie transfixiante (ou perforante)
- Greffe de toute l’épaisseur de la cornée
- Méthode traditionnelle, utilisée pour les atteintes centrales et profondes
- Indications : kératocône sévère, cicatrices importantes, opacités centrales
2. Kératoplastie lamellaire
Elle consiste à remplacer uniquement une couche spécifique de la cornée. Elle est de plus en plus utilisée grâce à ses avantages.
a. Kératoplastie antérieure (DALK)
- Remplacement des couches avant de la cornée, sans toucher à l’endothélium
- Moins de risque de rejet
b. Kératoplastie postérieure (DMEK ou DSAEK)
- Remplacement de l’endothélium uniquement
- Technique de choix pour la dystrophie de Fuchs
- Très rapide récupération visuelle
Déroulement de la greffe de cornée
1. Évaluation préopératoire
Le patient passe un bilan ophtalmologique complet (topographie cornéenne, OCT, mesure de la vision…) pour déterminer le type de greffe nécessaire.
2. Choix du greffon
La cornée provient d’un donneur décédé. Elle est prélevée, testée et conservée dans une banque de tissus certifiée. Contrairement à d’autres organes, la compatibilité immunologique n’est pas obligatoire pour la cornée.
3. L’intervention
- Réalisée sous anesthésie locale ou générale, selon les cas
- L’ophtalmologiste découpe la zone malade et la remplace par la cornée du donneur, suturée par des fils très fins
- L’opération dure entre 30 minutes et 1 heure
4. Suites opératoires
- Traitement par collyres antibiotiques et anti-inflammatoires
- Port d’une protection oculaire
- Suivi rapproché avec contrôle de la greffe
Récupération visuelle
La récupération de la vision dépend :
- Du type de greffe
- De la cause initiale
- De la présence d’autres problèmes oculaires (cataracte, glaucome)
Pour une kératoplastie transfixiante, la récupération peut prendre 6 à 12 mois. Pour les greffes lamellaires, elle est souvent plus rapide (quelques semaines).
Une correction optique (lunettes ou lentilles) peut être nécessaire pour affiner la vision, surtout en cas d’astigmatisme résiduel.
Résultats et taux de réussite
La greffe de cornée affiche des taux de succès très élevés, particulièrement dans les indications non inflammatoires :
- 90 % de réussite à 5 ans pour les kératocônes
- 80 % de réussite pour les dystrophies de Fuchs
- Moins bons résultats si l’œil est déjà pathologique (infections, inflammation, glaucome…)
Des greffes secondaires peuvent être proposées en cas d’échec.
Risques et complications
Même si elle est bien maîtrisée, la greffe de cornée comporte certains risques :
- Rejet du greffon : rare mais possible (5 à 15 % des cas selon la technique)
- Symptômes : baisse brutale de la vision, rougeur, douleur, photophobie
- Traitement : corticoïdes en urgence
- Infections
- Augmentation de la pression oculaire (glaucome secondaire)
- Sutures irrégulières causant un astigmatisme
- Opacité secondaire du greffon
Rejet de greffe : que faire ?
Les rejets sont rares, surtout avec les greffes lamellaires, mais doivent être pris en charge très rapidement. Les signes d’alerte doivent être bien connus du patient.
Traitement :
- Collyres ou injections de corticoïdes
- Arrêt des collyres hypotenseurs si présents
- Hospitalisation parfois nécessaire
Une prise en charge précoce permet souvent de sauver la greffe.
Vie après la greffe
- Surveillance régulière à vie chez l’ophtalmologiste
- Éviter les traumatismes oculaires
- Éviter le frottement des yeux
- Respecter le traitement local prescrit
- Correction visuelle adaptée après stabilisation
La majorité des patients retrouvent une vision fonctionnelle, compatible avec une vie active, professionnelle et sociale.